Histoire Huissier

Histoire Huissier

HISTOIRE Huissier : Brève histoire de la profession 


Cadet Rousselle a trois maisons,

Qui n’ont ni poutres, ni chevrons,
C’est pour loger les hirondelles,
Que direz-vous d’Cadet Rousselle ?

Cette chanson se moquant gentiment de l’huissier Guillaume Joseph Rousselle en 1792 sur l’air de la chanson Jean de Nivelle a traversé les siècles et est toujours d’actualité aujourd’hui.

Il en est de même avec la profession d’huissier de Justice qui a su traverser les âges depuis l’Antiquité : ne dit on pas que l’huissier de Justice est aussi ancien que la loi, et aussi nécessaire que les juges ?

HISTOIRE : HUISSIER SOUS L’ANTIQUITÉ

Dans le cadre imposé par la Pax Romana, les décisions des juges étaient appliquées par des officiales. Ceux-ci étaient répartis sous différents titres selon leurs fonctions. Ils avaient pour noms viatores, executorum latium, cohortales, statores; parmi eux les plus remarqués étaient les apparitores et les executores

*Les apparitores avertissaient le peuple pour les rassembler lors des jugements. Ils introduisaient les plaideurs et assuraient la police des audiences, c’est-à-dire qu’ils rétablissaient le silence lorsque les voix s’enflaient de trop.

*Les executores avaient pour tâche de s’emparer (de saisir) des biens des débiteurs récalcitrants ou même de les conduire en prison

HISTOIRE : HUISSIER AU MOYEN AGE

Puis la Pax Romana s’écroula sous le flot des nombreuses invasions barbares et la Justice privée réapparut .

Le royaume s’organisa autour d’un ensemble de hiérarchies qui chacune établit sa propre organisation judiciaire.
La Justice, attribut essentiel du pouvoir, se rendait alors sous la bannière de la multiplicité. Les lois se personnalisèrent selon qu’elles furent royales, seigneuriales, ecclésiastiques ou communales.

Pourtant, dans toutes ces différentes juridictions, une certaine unité permettait de représenter le pouvoir. Pour cela, il fallait des agents jouissant d’une autorité incontestée.

Nos officiales romains furent alors transformés en bedeaux, serviens, semonceurs (les semonces étaient les ancêtres des exploits, les actes d’aujourd’hui), puis en sergents et en huissiers.

Les sergents devaient mettre en forme les demandes des plaideurs et exécuter les décisions rendues par les juges, mais ils s’occupaient plus particulièrement des significations dans les juridictions seigneuriales.

Les huissiers (dont le nom vient de « l’huis », la porte) sûrs et attentifs, avaient la charge du service intérieur des Audiences et de la police des tribunaux.Puis, progressivement, les huissiers devinrent les officiers des juridictions importantes tandis que les sergents furent relégués aux juridictions de second ordre.

Leurs compétences s’élargirent, et il devint de plus en plus difficile de tous les regrouper en une seule catégorie.

Différents symboles permettaient de les distinguer :

On pouvait les reconnaître à leurs manteaux bigarrés puis rayés et à leur  » verge « .

Un décret datant de 1327 raconte que l’huissier devait avoir un bon cheval de la valeur de 100 livres, des armes suffisantes et une  » verge  » de la valeur de 50 livres.

Une ordonnance de mai 1425 précisait par ailleurs qu’ils devaient être mariés, tonsurés et porter continuellement leur costume rayé. L’huissier était un des symboles de l’autorité royale. Mais, c’était la  » verge  » qui était la principale caractéristique de l’autorité de l’huissier. Il s’agissait d’une sorte de petite baguette ronde, en ébène, longue d’une trentaine de centimètres garnie de cuivre ou d’ivoire.

Les huissiers devaient toucher, d’après un décret datant de 1568,  » ceux auxquels ils auront la charge de faire exploit de justice « .

C’est d’ailleurs de là que vient le mot  » exploit  » transformé par la suite en acte. (Le premier texte législatif qui prescrivit de rédiger des exploits et d’en laisser copie fut l’ordonnance de Villers-Cotterets)

De plus, et si l’on en croit Rabelais, ils portaient un anneau d’argent au pouce gauche. Cet anneau leur servait à sceller les relations de leurs exploits.Dès que l’huissier avait touché quelqu’un de sa  » verge « , celui-ci lui devait obéissance et soumission.

Il est à noter que François I »‘, apprenant qu’un de ses sergents de justice  avait été maltraité, aurait mis son bras en écharpe afin de marquer par ce geste symbolique que le traitement infligé à son agent le blessait lui-même et la justice toute entière avec lui.

Pour en revenir aux costumes, ils évoluèrent et varièrent selon les lieux et les juridictions. Affaire de culture et de situation dans cette complexe hiérarchie, l’habit d’huissier passait de la robe de laine à celle de satin noir, du simple bonnet à la toque de velours à cordon d’or…Jusqu’au plus empanaché de tous : le premier huissier du Parlement de Paris qui avait le titre de Maître, la qualité d’écuyer donc de noble et dont le costume était une robe rouge avec un bonnet de drap d’or, retroussé d’hermine avec une grosse perle.

En Janvier 1572, nos officiers perdent l’obligation du port de leur costume et leurs signes distinctifs se réduisent à un écusson à trois fleurs de lys visible sur l’épaule et toujours la  » verge « . Parallèlement, ils virent leurs attributions se compartimenter. Par exemple, à Paris, la juridiction du Châtelet comprenait six sortes d’huissiers :

  • Les huissiers audienciers pour les tribunaux
  • Les huissiers à cheval pour les faubourgs et les campagnes,
  • Les huissiers à pied pour le centre de la ville,
  • Les huissiers priseurs (les commissaires-priseurs actuels),
  • Les huissiers à la douzaine ( les gardes du prévôt), plus 4 huissiers dit fieffés dépendant uniquement du Châtelet qui pouvaient exploiter dans tout le royaume.

 

HISTOIRE : l’HUISSIER DE L’ÉPOQUE MODERNE À AUJOURD’HUI

Au mois de février 1705, un édit réunit en un seul corps la communauté des huissiers. C’est ainsi qu’ils prirent tous le titre unique d’huissier. Celui-ci leur permit  » d’exploiter en toute matière dans toute l’étendue du royaume et de résider où bon leur semblerait « .

Cette unification s’accompagna d’une réglementation quant à leur nombre. Jusqu’à l’arrêt du 22 Termidor an 8, chaque tribunal devant indiquer par un avis le nombre d’huissiers qui lui était nécessaire permettant ainsi au pouvoir central de reprendre en main cette catégorie professionnelle.

Ainsi apparut une ébauche du statut de l’huissier, renforcée par un décret impérial, datant du 14 juin 1813. Celui-ci reprenait d’ailleurs certains textes anciens pour déterminer par exemple le mode de nomination des huissiers et pour fixer les connaissances requises ainsi que les attributions exactes de ces officiers.

Si aujourd’hui, l’Huissier de Justice n’exerce plus en costume, la baguette à la main pour ajourner ou saisir les débiteurs, il reste pénétré de la grandeur de sa profession et des devoirs qu’elle lui impose dans sa participation à l’oeuvre de la Justice. Et le mot de Saint Appronien, patron des huissiers résonne encore, plein de respect : « Mon dieu, mon dessein est de n’avoir nulle collusion avec la partie adverse de la mienne, je me propose de ne jamais saisir chevaux ou ce qui servirait au gain de la vie des débiteurs… »

HISTOIRE : L’HUISSIER DE DEMAIN 

Après cet historique pour lequel nous remercions la Chambre Nationale des Huissiers de Justice, il nous appartient d’effectuer un peu de prospective.

Il est en revanche indéniable que l’huissier de Justice n’est pas un homme du passé : il manie la dématérialisation de ses actes, procède quotidiennement à des constats sur Internet, signe électroniquement ses actes et Procès-Verbaux etc…

Mais surtout, il reste le juriste de proximité, accessible aux justiciables destinataires des actes. Même écrits, les actes d’huissiers de Justice n’entraînent aujourd’hui pas une rupture du dialogue entre le justiciable et l’huissier de Justice. Il en est de même avec l’acte dématérialisé qui ne saurait créer une rupture de l’oralité entre les parties et l’huissier.

Mais surtout, tout comme les huissiers de Justice ont réussi à dématérialiser leurs actes du palais en matière civile à la Cour de Cassation, ces auxiliaires de Justice, arriveront, car ils sont indépendants des parties et impartiaux par nature, à gérer une transmission garantie de l’acte extra judiciaire dématérialisé.

Le professionnalisme de l’huissier de Justice, couplé à son statut particulier et à son expérience, en font l’unique professionnel capable d’assurer une transmission d’actes dématérialisés de qualité, protégeant tant le requérant que le destinataire de l’acte.

Demain, la profession d’huissier de Justice fusionnera avec celle de commissaire de Justice, et deviendra commissaire de Justice. C’est un nouveau tournant dans l’histoire de la profession.